Les chansons les plus reals de Nas, 50 Cent, T.I., Beanie Sigel et Danny Brown




Après Tupac, DMX, J Cole, Scarface et Kid Cudi, voici la deuxième des quatre parties regroupant 20 chansons sur lesquelles les rappeurs rappent avec leur coeur et leur âme.

Nas – Last Real Nigga Alive (2002)

Un an après Ether, Nas s’est de nouveau associé avec Ron Browz, le producteur de l’emblématique diss track, pour un regard bien plus introspectif face aux événements qui ont conduit au conflit d’Esco et Jigga. Ca n’a cependant pas empêché le MC souvent mystérieux et réservé de lever le rideau sur plusieurs autres problèmes, notamment ses débuts dans le rap, la scène Hip-Hop d’alors et ses tensions pourtant moins ébruitées avec Biggie:

« Y’all don’t know about my Biggie wars / Who you thought Kick in the Door was for? »

« Vous ne savez rien de ma guerre avec Biggie / A qui pensiez-vous que Kick In The Door était adressé? »

 

« That’s when Ghostface said it on The Purple Tape / Bad Boy bitin’ Nas album cover, wait / Big told me Rae was stealin’ my slang / And Rae told me, out in Shaolin, Big would do the same thing »

« C’est à ce moment que Ghostface a dit sur The Purple Tape (OB4CL) / Bad Boy a recopié la cover de l’album de Nas / Big m’a dit que Rae volait mon argot / Et Rae m’a dit que Big faisait pareil »

 

Il parle ensuite de la femme que lui et Jay ont eu en commun:

« Baby moms thought I was too quiet, couldn’t stand it / She hit the streets, later on she hittin’ the sheets / With a rapper who wanted me on his songs, thinkin’ he strong »

« La mère de mon enfant pensait que j’étais trop calme, elle ne le supportait pas / Elle est allée dans la rue, plus tard elle s’est retrouvée dans les draps / Avec un rappeur qui me voulait sur ses chansons, pensant qu’il était fort »

 

Et également la bataille de sa mère contre le cancer dont Jay-Z a profité pour tenter d’anéantir le rappeur de Queensbridge:

« I gave it all up so I can chill at home with Mama / She was gettin’ old and sick so I stayed beside her / We had the best times, she asked would I make more songs / I told her not ’til I see her health get more strong / In the middle of that, Jay tried to sneak attack / Assassinate my character, degrade my hood / ‘Cause in order for him to be the Don, Nas had to go »

« J’ai tout lâché pour pouvoir m’occuper de maman / Elle devenait vieille et malade donc je suis resté à ses cotés / On a passé des moments inoubliables, elle m’a demandé si j’allais faire plus de chansons / Je lui ai dit pas avant que je voie sa santé se rétablir / En plein milieu de ça, Jay a tenté une attaque sournoise / Assassiner mon personnage, dégrader mon quartier / Car pour que lui devienne le Don, il fallait que Nas parte »




La chanson représentait un chapitre mineur dans la guerre entre Nas et Jay-Z, mais ce fut également l’un des rares moments où l’un des deux adversaires passait plus de temps à expliquer son histoire personnelle qu’à simplement l’utiliser en tant que munition.

 

50 Cent – Many Men (2003)

Les neuf coups de feu que 50 Cent a pris avant d’accéder au statut de superstar sont un morceau indélébile d’à la fois sa musique et de son image. Ca lui a forgé un passé atroce et la balle qu’il a reçue dans la joue a amélioré son flow. Mais il n’a jamais parlé de cette expérience de façon aussi vivante comme il l’a fait sur Many Men (Whish Death). A certains moments, la chanson est le rugissement provocateur d’un improbable survivant, ricanant en direction de son commanditaire:

« Now these pussy niggas puttin’ money on my head / Go on and get your refund, motherfucker, I ain’t dead »

« Maintenant ces sal*pes de n*egros mettent de l’argent sur ma tête / Va te faire rembourser, enc*lé, je ne suis pas mort »

 

A d’autres, il met les points sur les i et prévient de ce qui arrivera tôt ou tard:

« Got a temper, nigga, go ‘head, lose your head / Turn your back on me, get clapped and lose your legs / I walk around gun on my waist, chip on my shoulder / ‘Til I bust a clip in your face, pussy, this beef ain’t over »

« J’ai un tempérament, vas-y et perds ta tête / Tourne moi le dos tu te feras tirer dessus et perdre tes jambes / Je me ballade avec un flingue à ma taille, en mode irascible / Jusqu’à ce que je fasse péter ce chargeur à ton visage ce beef n’est pas terminé »

 

Ou de ce qui est déjà arrivé…

« In the Bible it says what goes around comes around / « Hommo » shot me, three weeks later he got shot down / Now it’s clear that I’m here for a real reason / ‘Cause he got hit like I got hit, but he ain’t fuckin’ breathin' »

« Dans la Bible, on dit que ce qui doit arriver arrivera / « Hommo » m’a tiré dessus, trois semaines plus tard il s’est fait abattre / Maintenant c’est évident que je suis là pour une vraie raison / Car il s’est fait toucher comme je me suis fait toucher mais lui ne respire plus »




Mais même la ligne tempérée et mielleuse…

« Joy wouldn’t feel so good if it wasn’t for pain »

« La joie ne serait pas si bonne si la douleur n’existait pas »

…Porte un poids dont l’impact n’aurait pas été aussi percutant si 50 Cent n’avait pas déjà éprouvé un genre de douleur que peu de gens peuvent se targuer d’avoir expérimenté tout en étant encore en vie pour en parler.

T.I. – I Still Luv You (2003)

Avant la célébrité et son mariage avec Tiny Cottle, Clifford « T.I. » Harris était déjà papa de deux enfants qu’il avait eus avec Lashon Dixon, sa petite amie du lycée et d’un troisième avec une autre femme alors qu’il était toujours en couple.

Le premier couplet de I Still Luv You adressé à Dixon est un compte rendu émotionnel compliqué de ce feuilleton enchevêtré:

« Forgave me once, forgave me twice, forgave me three times / I stayed lyin’, you stayed down in the meantime / Had my son and turned around and had another one / I broke yo heart when I told you bout the other one »

« Tu m’as pardonné une, deux, trois fois / J’ai continué à mentir, pendant ce temps tu restais fidèle / J’ai eu mon enfant et je me suis retourné et en ai eu un autre / Je t’ai brisé le cœur lorsque je t’ai dit qu’il y en avait un autre »

 

« I’m still the same man, just had a change of plan / Never ask you back and fuck a wedding band / But I still love you »

« Je suis toujours le même mec, j’ai juste changé de but / Je ne t’ai jamais demandée de revenir et je ne voulais pas me marier / Mais je t’aime toujours »

 

Le second couplet est adressé à l’absence de son père.

« Went from resentin’ you, hatin’ you, now I’m missin’ you »

« Je suis allé de t’en vouloir à te détester, maintenant tu me manques »

 

« You tried to make it up, but shit, you couldn’t pay enough / You sent me tons of toys and clothes thinkin’ you gave enough / But it wasn’t though, and you wasn’t there / That’s all I knew, so I grew up thinkin’ you ain’t care »

« T’as essayé de te rattraper, mais tu ne pouvais pas payer assez / Tu m’as envoyé des tonnes de jouets et de vêtements pensant que tu m’avais donné assez / Mais ça ne l’était pas, et tu n’étais pas là / C’est tout ce que je savais donc j’ai grandi en pensant que tu ne te souciais pas de moi »

 

Dans une interview, T.I. précisait que cette chanson avait été rédigée pendant que son père était mourant. « Nous avons passé ses derniers jours ensemble. J’ai fait cette chanson pour lui faire savoir que tout avait été pardonné. »




Ces deux chapitres sont liés ensemble par le troisième couplet dans lequel Tip s’adresse à la fille qu’il a eue en trompant Dixon tout en s’inquiétant de commettre les mêmes erreurs que son père, et tente d’accepter la responsabilité de ses actions en profitant au maximum de sa paternité imprévue.

« How could I criticize my daddy on that last verse / Lookin’ at my own dirt, you got some nerve »

« Comment puis-je critiquer mon père sur le couplet précédent / Regardant mes propres mauvaises actions, tu ne manques pas d’air »

 

« I got a lil’ girl, not just two lil’ boys / And that’s been killin’ me inside, eatin’ me alive / And I can’t find the words, nor the nouns or verbs / To express whachu deserve, girl you worth the world »

« J’ai une petite fille, pas juste deux petit garçons / Et ça me tue à l’intérieur moi, ça me bouffe / Et je n’arrive pas à trouver ni les mots ni les noms ni les verbes / Pour exprimer ce que tu mérites, tu vaux le monde »

 

« But I ain’t ashamed of you, I’m more ashamed of me / It’s not at all yo fault, you’d be better off blamin’ me / But now I realize, where the problem lies / Forgive me babygirl, I apologize / And I still love you »

« Mais je n’ai pas honte de toi, j’ai plus honte de moi / Ce n’est pas du tout ta faute, tu ferais mieux de me le reprocher / Mais maintenant je réalise où réside le problème / Pardonne moi mon petit bébé, je m’excuse / Et je t’aime toujours »

Beanie Sigel – What Ya Life Like (2000)

Beanie Sigel a débarqué dans le rap game avec une feuille remplie de textes, et s’est retrouvé dans et en dehors de prison tout au long de sa carrière. Mais c’est sur son premier album qu’il sonnait si morose et éclairé quant aux dures réalités de la vie lorsqu’on se trouve du mauvais coté de la loi, et le titre phare « What Ya Life Like » retentit alors telle une version musicale de la célèbre série OZ.

Tandis que la prison est souvent vue comme une étape inévitable dans le rap gangsta, Beans se penche dans les descriptions évocatrices de l’isolement:

« What you know about twenty-three and one / Locked down all day, underground, neva seein’ the sun / Visits stripped from you, neva seein’ your son »

« Que connais-tu des 23 heures et une / Enfermé toute la journée, dans le sous sol, sans jamais voir le soleil / Sans aucune visites, sans jamais voir ton fils »




Dans les conditions d’incarcération:

« Them Little Debbies and them Chi Chi’s, they makin’ you sick / You gotta wash out your drawers same water you shit / Brush, gargle, and spit same water you piss »

« Cette nourriture te rend malade / Tu dois nettoyer tes draps avec la même eau dans laquelle tu chies / Te brosser les dents, gargariser et cracher dans l’eau dans laquelle tu pisses »

 

Et de la contrebande de drogue sous les verrous, le tout avec une intensité éblouissante et frissonnante.

« What you know about gettin’ and shippin’ balloons / Keep switchin’ positions in the visitin’ room / Gotta take Ex-Lax, hope you did it in time / Gotta shit in your palm just ta get the heroin »

« Que connais-tu des ballons de drogues à faire venir / Changer de position dans la salle des visites / Tu dois prendre du laxatif, j’espère que tu l’as pris à temps / Tu dois chier dans la paume de ta main juste pour récupérer l’héroïne »

Danny Brown – Torture (2010)

Si on met de côté sa nature extravagante, Danny Brown est l’un des artistes les plus honnêtes du Hip-Hop. Torture détaille son éducation terrifiante à Detroit avec une atroce précision:

« Remember one time dawg, this fiend owed the boss / Put peanut butter on her pussy, let his pits lick it off »

« Je me rappelle d’une fois, cette droguée devait du fric au boss / Il lui a mis du beurre de cacahouète sur sa chatte et a laissé ses pitbulls le lécher »

 

« Seen another dope fiend beat another with a hammer / Remember at the park, seen a nigga at the payphone / Got rocked in his dome, momma picked me up and ran home / Was like fucking seven years old »

« J’ai vu un autre drogué frapper un autre avec un marteau / Je me rappelle au parc, j’ai vu un négro au téléphone public / Il s’est pris une balle dans la tête, maman est venue me chercher et m’a conduit à la maison / J’avais que 7 ans »

 

Et les effets que ces expériences traumatisantes ont eu sur lui:

« Mind ticked off / Desensitized to a lot of things, mind would drift off / Wish it was what I seen on TV »

« Ca a marqué mon cerveau / Ca m’a désensibilisé à beaucoup de choses, mon esprit dérivait / J’aurais aimé avoir vu ça à la télé »

 

« And it’s torture / Look in my mind and see the horrors / All the shit that I’ve seen, nigga it’s torture »

« Et c’est de la torture / Regarde dans mon esprit et vois les horreurs / Toute la merde que j’ai vue, négro c’est de la torture »

 

« I feel like a, prisoner of war / Reacting sporadically to what the mind absorb / Probably need a shrink, can’t get a wink / So I smoke a lot of kush and pop a Xanax to sleep »

« Je me sens comme un prisonnier de guerre / Réagissant sporadiquement à ce que l’esprit absorbe / J’ai probablement besoin d’un psy, je n’arrive pas à fermer les yeux / Donc je fume beaucoup de kush et m’envoie un Xanax pour dormir »

 

Dans une interview il avait déclaré: « Peu importe où je me trouve, je peux encore fermer les yeux et voir des drogués »

Cette chanson évoque le Danny Brown de ses débuts et rappelle l’auditeur qu’il y a bien plus dans la disco du MC que des drogues et des soirées »

Article rédigé par Gilles B. (traduction des paroles par Adra)




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