Brenda’s Got A Baby, le signal d’alarme de Tupac face aux problèmes du ghetto

De quoi ça parle? est la nouvelle section d’Adramatic Hip-Hop dans laquelle vous retrouverez quotidiennement une analyse textuelle détaillée d’un son ainsi que la traduction de ses passages clés afin d’en extraire l’histoire qu’il raconte.

 

‘Brenda’s Got A Baby’ sorti en 1991 est le deuxième single du premier album de 2pac ‘2pacalypse Now’. Ici, il raconte l’histoire d’une jeune adolescente de 12 ans qui tombe enceinte de son cousin. Tupac dénonce le manque d’intérêt que la société porte aux grossesses involontaires chez les adolescentes en racontant l’histoire tragique de cette fillette.



Brenda tombe enceinte alors que ce n’est encore qu’une petite fille :

J’ai entendu dire que Brenda a eu un bébé, mais Brenda a à peine un cerveau
Dommage que la fille ne sache pas épeler son nom

Tupac expose le contexte familial dans lequel Brenda a grandi. Elle n’a jamais eu de véritable autorité parentale, ce n’est pas pour autant que son destin était voué à l’échec :

Brenda n’a jamais vraiment connu sa mère
Et son père était un junkie, s’injectant la mort dans ses bras
C’est triste, car je parie que Brenda ne sait même pas
Que ce n’est pas parce que tu es dans le ghetto que tu ne peux pas t’émanciper

Brenda tombe enceinte de son cousin et masque sa grossesse à sa famille par peur. Sa famille ne s’intéresse à elle que parce que l’Etat leur donne des aides pour l’élever :

Brenda s’est trouvé un petit ami
Son petit ami était son cousin, regardons maintenant la joie prendre fin
Elle a essayé de cacher sa grossesse à sa famille
Qui ne se souciait pas vraiment
Si elle sortait et avait énormément d’enfants
Tant que lorsque le chèque arrivait ils étaient preum’s

Personne ne se soucie réellement de Brenda jusqu’au point de ne même pas remarquer que son ventre grossit :

Maintenant, le ventre de Brenda grossit
Mais personne ne semble remarquer de changement dans sa silhouette
Elle a douze ans et elle va avoir un bébé




Abandonnée par son cousin, elle vit seule sa grossesse. Brenda accouche par elle-même, dans une salle de bain et jette le nourrisson à la poubelle. Elle souhaiterait être insensible et l’abandonner, mais comprend qu’elle vient de mettre au monde un humain :

Il l’a quittée et elle a eu le bébé seule
Elle l’a eu sur le sol de la salle de bain et ne savait pas, alors
Elle ne savait pas quoi jeter et quoi garder
Elle a enveloppé le bébé et l’a jeté dans un tas d’ordures
Je suppose qu’elle pensait s’enfuir, qu’elle n’entendrait pas les pleurs
Elle n’a pas réalisé à quel point le petit bébé avait ses yeux

Brenda hésite, elle entend les pleurs du bébé mais elle sait qu’elle n’a pas la capacité mentale et financière de garder son enfant, et elle se dit qu’en le laissant là, un travailleur social finir par le trouver et le prendre en charge :

Le bébé est maintenant dans la poubelle, pleurant
Maman ne peut pas l’aider, mais ça fait mal de l’entendre appeler
Brenda veut s’enfuir
‘Maman dit que tu me fais perdre de l’argent’
Il y a des travailleurs sociaux ici tous les jours

Maintenant, Brenda doit tracer son propre chemin
Elle ne peut pas aller dans sa famille, ils ne la laisseront pas rester
Pas d’argent, pas de baby-sitter, elle ne peut pas garder un emploi
Elle a essayé de vendre du crack mais a fini par se faire voler
Et maintenant, quelle est la suite ? Elle n’a plus rien d’autre à vendre
Elle voit donc le sexe comme un moyen de quitter cet enfer
Elle paie le loyer, elle ne peut donc pas se plaindre
Prostituée, retrouvée morte, et Brenda est son nom
Elle a un bébé

Elle décide finalement de le garder, mais sachant que sa famille la rejettera, elle doit à présent gagner de l’argent par elle même pour qu’elle et son bébé puissent survivre. Elle se lance en tant que dealeuse de crack, or les codes de la rues ne sont pas si faciles. C’est pourquoi, elle se rabat sur la prostitution. Violentée, elle est retrouvée morte.





La véritable histoire de Brenda:

‘Brenda’s Got a Baby’ est inspiré d’un fait réel survenu début des années 90’s. Son vrai prénom ne semble pas avoir été communiqué donc je vais continuer de l’appeler Brenda.

Lorsqu’elle était âgée de 4 ans, ses deux parents sont morts dans un incendie. Placée chez sa tante émotionnellement instable, elle vivait alors dans une maison où la drogue et l’alcool étaient quotidiens. Elle fut inscrite dans une école pour déficients mentaux et ne manqua aucun cours. Sans aucun repère, aucune figure paternelle ni maternelle, Brenda sera complètement paumée, à un tel point que son cousin alors âgé de 21 ans en profitera en la violant au moins à deux reprise lorsqu’elle avait 11-12 ans. Elle tombera enceinte et le cachera à son entourage, pour finalement donner naissance à son bébé dans sa chambre, accompagnée d’une amie. Elle le mettra dans un sac de course et s’en débarrassera dans le vide-ordures, le bébé fera alors une chute de 4 étages. Ce sont des ouvriers de maintenance qui le récupéreront après avoir entendu des cris. Cela n’empêchera pas Brenda d’aller à l’école, dans un état épouvantable, quelques heures après avoir donné naissance. Une fois alertés, les autorités mèneront leur enquête tandis que Brenda et son bébé (qu’elle finira par réclamer) seront placés dans un foyer.




Tupac, sensibilisé par cette histoire et frustré que les journaux n’en parlent pas plus avait donc décidé d’en faire une chanson:

« Lorsque cette chanson est sortie, aucun rappeur ne parlait des problèmes que les filles et les femmes subissaient. Ensuite, ça parlait d’agression sexuelle sur enfant, ça parlait des familles qui profitaient d’autres familles, ça parlait des effets de la pauvreté, ça parlait de comment les problèmes d’une personne pouvaient affecter toute une communauté de gens. Ca parlait de la façon dont les innocents sont ceux qui se font blesser. Ca parlait de drogues, de l’abus de drogues, de familles brisées, de comment elle ne pouvait pas abandonner le bébé tu sais, le lien qu’une mère a avec son bébé et la façon dont les femmes doivent pouvoir avoir le choix. »

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Jeanne N
Jeanne N
Passionnée de la culture hip-hop depuis des années, je suis une grande fan de gangsta rap notamment N.W.A, Ice-T, 2Pac ainsi que d’artistes new-yorkais tels que Notorious B.I.G, Mobb Deep, Nas ou encore Public Enemy.