Focus sur cinq sons de DMX avant qu’il soit connu, à l’époque où il empruntait un style totalement différent de celui qui allait faire sa renommée.
Les premiers sons de DMX sont stupéfiants à écouter en ce moment. Non pas parce qu’ils sont excellents, mais parce qu’ils ne ressemblent pas vraiment au MC qui allait conquérir le monde à la fin des années 90.
En 1991, fraîchement sorti de prison, X a autoproduit une démo comprenant des chansons comme « Three Little Pigs » et « Unstoppable Force ». La première » est assez dantesque, avec un beat martelant et un récit édifiant sur des amis qui se trahissent pour le crime et l’argent. Mais tout ce pour quoi DMX allait être connu – les aboiements, l’agressivité, la voix rugueuse – est absent. On note en revanche une énorme inspiration venue de Rakim. Je dois insister sur le fait que c’est vraiment DMX qui rappe sur l’entièreté du morceau, avec une voix totalement différente de celle qui a construit sa légende.
Ecoutez « Three Little Pigs » de DMX ci-dessous.
Une force imparable
« Unstoppable Force » quant à elle est digne des meilleurs égotrips de l’époque où il laisse parler son talent lyrical à l’encontre de quiconque oserait le défier.
Je suis le D-M-X, une force imparable
La seule façon de m’arrêter, c’est si ma voix devient enrouée
Mais là encore, ça ne m’arrêterait pas, parce que rien ne peut m’arrêter
Je perds ma voix, je change de style et je fais une rime avec mes mains
Je te ferai partir comme une feuille, je te piétinerai comme une pédale
Mortel comme un serpent avec des hochets et du venin
Hmmm, maintenant réfléchis encore
Tu penses toujours que tu peux m’affronter et gagner ?
Non, je ne le pense pas, je n’ai plus d’encre
Un stylo le rendra si funky qu’il puera
Je suis tellement bon (j’ai tellement de drogue) que je vais faire planer un drogué
Et là encore, il fera une overdose et mourra
Alors, puis-je, dis-je, être étiqueté comme une brute ?
Suis-je un semi, non parce que je suis complètement
Automatiquement chargé, dramatiquement explosé
Une force imparable, avec laquelle il ne faut pas mieux composer
Je m’éclaircis la gorge, j’arrive au soundcheck avec
Un micro, je vais me battre, ralentir et accélérer
J’ai mélangé la sauce, je t’ai servi sur un plateau et j’ai tout mangé
Je sais ce que tu veux me faire, tu le ferais si tu pouvais
Mais tu ne peux pas, alors quand j’ai faim, tu es bon à croquer
Mieux qu’un menu à trois services, tu ressens le remords
De la force I-M-P-A-R-A-B-L-E
Ecoutez « Unstoppable Force » de DMX ci-dessous.
La démo atterrit quelques mois plus tard dans la légendaire rubrique Unsigned Hype du magazine The Source, mais il lui faudra encore sept ans pour sortir son premier album solo.
Born Loser: focus sur les malheurs de DMX
D’autres chansons viendront l’aider à affiner son style – « Born Loser », en 1993, commence à construire son histoire d’outsider.
Dans les deux premiers couplets il décrit à quel point sa situation était dramatique.
Les temps sont durs dans le ghetto, je dois voler pour vivre
Je n’ai pas d’adresse, je ne peux pas toucher d’allocations
Ils m’ont viré du foyer parce qu’ils ont dit que je sentais un peu
Comme un mort-vivant et que je ressemblais à Helter Skelter (Charles Manson)
On voit des côtes dans mon dos parce que je n’ai pas mangé
Dans environ une semaine, vous pourrez voir des os dans mes mains
Les ratons laveurs m’ont battu jusqu’aux poubelles
Dans le troisième et dernier couplet, X parle du présent qui le voit devenir un gagnant.
Le perdant né, ouais, c’était mon mode opératoire
Quand personne n’écoutait ma démo
Les portes se fermaient devant moi jusqu’à ce que je commence à les enfoncer
Je suis derrière les portes maintenant et c’est moi qui les claque
Rien n’a changé, je suis le même qu’avant
Quand l’opportunité a frappé, j’ai juste répondu à la porte
Criminel dans l’âme même si je ne le montre pas
J’ai toujours été un gagnant, mais je ne le savais tout simplement pas
Ecoutez « Born Loser » de DMX ci-dessous.
Le DMX qu’on connait
Il faudra attendre 1994 et « Make a Move », pour commencer à entendre le DMX de It’s Dark and Hell Is Hot. On retrouve la chanson sur l’album … And Then There Was X sorti en 1999 avec une instru différente. Les paroles montrent un DMX empressé de gagner sa vie.
Il n’y a pas de vrai pognon, c’est pour ça qu’un gars se sent si frustré
Je déteste ça, voir des traitres qui ont réussi
Et je vole des gars tout aussi fauchés que moi
Je vis mal et je ne fais pas attention à ma santé, où se trouve la fortune ?
Cette chanson a donc la particularité d’avoir été enregistrée avant que DMX soit connu, et d’être sortie au sommet de sa carrière.
Ecoutez la version originale de « Make a Move » de DMX ci-dessous.
En guest aux côtés de Jay-Z et Ja Rule
En 1995, il apparaît sur « Time to Build » de Mic Geronimo aux côtés de Jay-Z et de Ja Rule, qui n’étaient pas encore non plus célèbres. (Coup dur pour Mic Geronimo, qui était censé être la star de cette chanson).
À ce stade, la personnalité de X sur la chanson a pris forme.
J’ai fait trop de saloperies pour revenir en arrière maintenant
C’est à cause de moi que ma petite sœur fume du cr*ck maintenant
Je me sentirais coupable si j’avais un coeur, mais je n’en ai pas
Je pourrais vivre une vie insouciante si j’arrêtais de tuer, mais je ne le ferai pas
C’est dans mon sang de détruire l’humanité
A chaque meurtre, je perds un peu plus la tête
Ecoutez « Time To Build » de Mic Geronimo avec DMX ci-dessous.
Ces cinq chansons de DMX sont donc apparues avant qu’il soit connu, signe qu’à l’époque le niveau du hip-hop underground était déjà costaud.
La prochaine fois que le monde entendra DMX, il sera signé chez Def Jam et fera le ménage sur des posse cut comme « 4, 3, 2, 1 », « Money, Power & Respect » et « 24 Hrs. to Live ».
À ce moment-là, il deviendra vraiment une force imparable.